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LIV. I. SATIRE VIII.

Deux figures ensuite arrivaient sur la scène,
La plus petite en cire et la plus grande en laine.
Celle-ci, retenant sa compagne à genoux,
Semblait à la punir animer son courroux ;
Et comme une humble esclave implorant sa justice,
L’autre, prête à périr, attendait son supplice.
Nos deux Circés alors évoquaient des enfers
Hécate, Tisiphone et leurs monstres divers ;
Les cieux s’enveloppaient de ténèbres profondes.
On voyait dans la nuit errer des chiens immondes ;
On voyait se traîner des reptiles impurs ;
La lune se voilait de nuages obscurs,
Et, pour fuir ces horreurs, cherchant un lieu plus sombre,
Derrière un grand tombeau disparaissait dans l’ombre.
Puissé-je, mes amis, si je dis rien de faux,
Voir tomber sur mon front l’ordure des corbeaux !
Faut-il vous dire tout ? Faut-il de nos harpies
Vous conter en détail les mystères impies ?
Comment de leurs clameurs les airs retentissaient :
Comment à leurs discours les mânes répondaient :
Comment, ayant cherché, pour finir ce grand œuvre,
Une barbe de loup et des dents de couleuvre,
À l’écart, en tremblant, d’une furtive main,
Elles les déposaient dans un lieu souterrain ;
Puis jetaient sur le feu la figure de cire ?
Comment, à les voir faire, à les entendre dire,
Et d’indignation et d’horreur pénétré,
Je ne pus retenir mon dépit concentré.
Car tel que l’on entend d’une vessie enflée
S’échapper avec bruit l’air dont elle est gonflée,