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Reprend ce campagnard, ennemi des procès,
Qu’une assignation arrache à ses guérêts.
Je finis, car ces traits, dont mon sujet abonde,
Lasseraient Fabius qui lasse tout le monde.
Pour ne point vous traîner par de trop longs détours,
Écoutez où je veux amener ce discours.
Que vers ces insensés descendu sur la terre,
Un Dieu leur dise : eh bien, je vais vous satisfaire.
Laboureur, vous allez devenir avocat ;
Vous, soldat, commerçant ; vous, commerçant, soldat.
Changez de rôle : allons : quoi ! tout reste immobile !
D’être heureux cependant il leur est bien facile.
À quoi tient, juste ciel, que le Dieu dépité
Ne jure, en leur lançant un regard irrité,
De n’être plus si bon que de prêter l’oreille
Aux vœux impertinents d’une engeance pareille !
Passons et gardons-nous des frivoles bons mots
D’un plaisant qui s’amuse et rit à tout propos ;
Quoique la vérité n’empêche pas de rire,
Et qu’en jouant parfois il soit bon de la dire ;
Comme on voit à l’enfant, sous l’appât des bonbons,
Le maître présenter ses premières leçons.
Mais c’est trop prolonger un léger badinage ;
Avançons, et prenons un plus grave langage.
Celui qui dans la terre enfonce un soc tranchant,
Le perfide hôtelier, le soldat, le marchand
Qu’au sein des vastes mers mille écueils environnent,
Demandez-leur pourquoi la peine qu’ils se donnent ?
C’est, vous répondront-ils, qu’ils veulent en repos,
Jouir, dans leurs vieux jours, du fruit de leurs travaux.