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Délicieuses nuits ! soupers dignes des dieux !
Lorsqu’avec des amis satisfaits et joyeux,
Fêtant dans un banquet mes pénates rustiques,
Le reste du festin passe à mes domestiques !
Chaque convive alors, sans contrainte, sans lois,
Prend la coupe qu’il veut et le vin de son choix
Soit qu’il aime à verser dans un ample cratère,
Soit qu’il trouve meilleur de boire à petit verre.
Bientôt, sans y penser, chacun entre en propos :
Nous causons, non d’argent, de terres, de troupeaux,
Ni de l’art merveilleux dont Lépos, au théâtre,
Sait charmer en dansant tout un peuple idolâtre.
À profit entre nous mettant mieux les instans,
Nous nous entretenons d’objets plus importans ;
Si l’homme n’est heureux qu’au sein de la richesse :
Si le bonheur plutôt n’est point dans la sagesse :
Si l’amitié pour base a toujours l’intérêt :
Ce que c’est que le bien, quel est le bien parfait.
Le voisin Cervius, à ce grave langage,
D’un vieux conte parfois mêle le badinage.
Parle-t-on d’Arellus ? et vient-on nous vanter
Ses terres, ses trésors ? Il se met à conter.
Un jour le rat des champs, d’une façon civile,
À souper dans son trou pria le rat de ville.
C’était fête au village. Il vivait sobrement,
Mais savait aux bons jours en user noblement.
Son camarade arrive : il s’empresse, il apporte
Des grains, des raisins secs, des fruits de toute sorte,
Et, pour dernier régal, tire de son buffet
Du lard qu’il n’avait point grignoté tout-à-fait,