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ACTE TROISIÈME.

QUENTIN, souriant.

Eh bien, mais cela va tout seul alors ; nous voulions nous proposer l’association. — Offrez-nous-la, nous acceptons !

TOUPART, appuyant de même.

Voilà !

QUENTIN, bas à Toupart et regardant l’effet produit sur Jonathan.

Je crois que c’est assez rusé ?

TOUPART, bas.

Je crois aussi !

JONATHAN, qui a entendu.

Je crois aussi !… Mais je n’ai pas besoin d’associés !

QUENTIN.

Vous ne connaissez pas la partie !… Un charpentier !

JONATHAN, se levant brusquement.

Allons donc ! Des épingles ou des poutres ! Mais je la sais par cœur, votre fabrique : c’est mal bâti, mal établi, mal mené, et je vais vous faire marcher ça, vous allez voir !…

QUENTIN et TOUPART.

Ah !

JONATHAN.

D’abord, les ateliers par terre, c’est trop petit ; et le moulin à bas, c’est trop grand ; et la rivière ici, c’est trop loin ; et les forges au delà, c’est trop près ! — Et ce salon-là. Regardez-moi cela ! — En voilà de la place perdue… (Quentin et Toupart regardent d’un air effaré tout ce qu’il leur montre.) Quand j’aurai fait passer ici trois tuyaux de calorifère… sous le plafond, les conduits de gaz ; sous le parquet, les conduits d’eau ; un treuil dans un coin, un moufle dans l’autre, avec des fils électriques en travers pour les ordres et un chemin de fer en biais pour les paniers ; vous verrez un peu la mine que ça aura !

QUENTIN, étourdi.

Eh bien, et le thé ?… où le prendra-t-on, le thé ?

JONATHAN.

On le prendra au milieu !

QUENTIN, à Toupart.

C’est un homme qui défriche. Voilà l’inconvénient des hommes qui défrichent ! Prenons-le par le cœur !

TOUPART.

Tâtons le cœur ! Et ta famille, Jonathan ? et tes bons parents, mon enfant, où les mettras-tu ?