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LES FEMMES FORTES.

seoir près d’elle.) Mais avant tout, mademoiselle, oserai-je vous demander des nouvelles de mon ami, M. Quentin ?

CLAIRE.

Elles sont excellentes, monsieur, et nous l’attendons tous les jours.

LACHAPELLE.

Déjà ?

CLAIRE.

Dites si tard. Pour le peu qu’il avait à faire à New-York, car vous savez le but de son voyage…

LACHAPELLE.

J’ai entendu parler d’héritage…

CLAIRE.

Précisément ! L’usine de Marville, près du Havre : une fabrique d’épingles !

LACHAPELLE.

Une propriété de deux millions ; je suis du pays, mademoiselle, et je sais ce qu’elle vaut.

CLAIRE.

Alors, vous savez probablement que le défunt M. Quentin Mascaret, oncle de mon parrain, était un homme fort habile, mais fantasque et maniaque !…

LACHAPELLE.

Je l’ai ouï dire !

CLAIRE.

Comme depuis dix ans il refusait toujours, et sans motif connu, de recevoir ses héritiers légitimes, mon parrain et sa sœur, madame Toupart M. Quentin se résignait à vivre modestement du produit de cette maison dont il est propriétaire, et madame Toupart des petites rentes de son mari, et ils faisaient tous deux leur deuil de l’héritage ; mais M. Mascaret est mort sans faire de testament, et la propriété leur revient de droit !

LACHAPELLE.

C’est un million pour chacun !…

CLAIRE.

Non ! car il existe un troisième héritier, un frère de M. Quentin et de madame Toupart qui habile New-York. M. Quentin n’a pas pu se résigner à la vente ou au partage de l’usine ; il a proposé l’association à sa sœur, qui l’accepte, et son voyage à New-York n’a d'autre but que d’obtenir le même consentement de son frère !