Page:Sarcey - La route du bonheur, 1909.djvu/91

Cette page a été validée par deux contributeurs.
75
vacances d’hier.

unique dépourvue d’élégance, et la vue de la gare, la certitude que nous allions monter en chemin de fer, nous donnaient un vertige de joie… Et, quoique nous ne dussions guère séjourner plus de trois heures dans le wagon, nous emportions avec nous une provision de chocolat, de sandwichs, de volumes à lire, et, finalement, nous restions en extase, le nez collé à la vitre, regardant tournoyer devant nous les champs de blé, et le clocher pointu des églises, et les pelouses soignées des châteaux, et les bonnes bêtes qui paissent dans les pâturages.

La campagne nous enivrait…

Dans ces temps-là, il ne venait à l’idée de personne qu’on eût à divertir la jeunesse. Elle s’amusait comme elle pouvait. Le golf, le tennis, le diabolo, étaient inconnus ; la bicyclette n’existait pas ; le croquet semblait objet de luxe, et les pique-niques, les excursions, la comédie, les réunions dansantes, eussent été jugés sévèrement et qualifiés de déraisonnables… La question n’était même pas agitée.

On flânait autour du jardinier ; on allait voir la bonne mère Jitard, qui soignait la basse-cour et savait les vieilles chansons du pays ; on regardait faire le beurre, puis la lessive ; et les jours de liberté coulaient paisibles, dans une médiocrité heureuse et douce… Et l’on revenait à