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la jeune fille.

les écolières ont, dans les yeux, des lueurs de combat et, sur leurs visages pâlis, des tressaillements de condamnées. Elles rient nerveusement, parlent d’une voix faussée, ne donneraient pas leur place pour un empire, et déclarent, néanmoins, qu’elles vont mourir sur l’heure d’émotion. Pour tout dire, ce sont des victimes heureuses, qui désespérément espèrent.

Vous étonneriez beaucoup ces pauvres enfants en leur déclarant qu’un examen — vu du haut de Sirius — est une infime chose, tout au plus une vaine formalité. Elles croient à son efficacité comme au feu : leur vie est suspendue au bout de l’arrêt que prononceront leurs bourreaux. Et, tout à l’heure, après que l’un de ces deux mots magiques : Reçu ou Refusé, aura été prononcé, elles connaîtront — ou, du moins, croiront connaître — le sommet du bonheur ou l’infini du désespoir.

De tous les souvenirs que laisse l’adolescence il faut compter, je crois, parmi les plus profonds, ceux qui s’attachent à ces premiers succès d’école.

Ce sont autant de victoires ailées qui vous emportent dans le pays du rêve. Le moindre parchemin arraché à la mansuétude d’un jury vous transporte vers ces horizons où l’avenir se teinte des plus agréables couleurs.