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l’enfant.

bande eût récité des vers de sa composition ; et le loustic-cabot, grinçant des dents et secouant sa crinière, eût imité Mounet-Sully ; ou bien encore, ma cousine, on se fût arraché les cheveux en parlant politique, et puis réconcilié. Et cela, probablement, eût été stupide, mais gai et bon enfant, le bruit étant l’esprit de la jeunesse ; et les bans joyeux, et les monômes, tout le long du Boul’ Mich’, eussent clôturé la réunion comme il convient.

Vous ne pouvez vous figurer, ma cousine, combien cette hantise de la discipline, à tout propos et hors de propos, enlève de grâce et de légèreté à un peuple naturellement hospitalier. Tous les ordres donnés, quels qu’ils soient, sont exécutés à la lettre, avec une rigueur exaspérante, sans que jamais il vienne à l’idée de quiconque d’en interpréter l’esprit.

Pour vous en donner un exemple entre mille : il était décrété qu’à partir de huit heures du soir, les hommes ne pouvaient franchir le casino peu folâtre d’Ems que vêtus de noir : veston, redingote ou habit, — ce qui, dans le langage des équivalents, revenait à dire qu’une tenue décente était de rigueur.

Or, un soir, nous arrivons, avec quelques amis, pour jouir du charmant spectacle d’un bal d’enfants, et le front haut, la conscience