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la règle.

élèves (je parle des écoles gratuites) et ils en usent abondamment. Un bambin arrive-t-il en retard de quelques minutes, il reçoit, sans autre explication, ce que nos pères appelaient, et pour cause, une dégelée : moyen excellent, paraît-il, pour faire pénétrer, dans la caboche des enfants, le souci de l’exactitude. Manque-t-il une classe entière, alors, ma cousine, la chose tourne au drame : un sévère polizier à casque vient interroger les parents et leur inflige, pour un manquement aussi inqualifiable, une amende de cinquante pfennigs, si bien que le jeune flemmard reçoit deux magistrales corrections, au lieu d’une : la première, des parents indignés ; la deuxième, de l’instituteur ; quelquefois, le pauvre petit, à force d’être battu, reste pantelant sur le carreau, détail sans importance lorsqu’il s’agit de tremper les caractères.

Une baigneuse du grand établissement d’Ems, avec une philosophie qui me donnait envie de l’étrangler, me contait qu’un jour Johann, son sixième garçon, était revenu de l’école l’oreille en sang. Le maître, pour lui apprendre le silence, l’avait soulevé de son banc par les deux oreilles ; l’une, moins solide que l’autre, n’avait pas résisté à la secousse, et Johann avait souffert pendant deux mois de cette gracieuse plaisanterie ; mais, ajoutait cette Allemande en manière