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la vertu d’un peuple.

vant même, par je ne sais quelle beauté saine qui montait de leurs voix rudes et s’accordait divinement avec le décor de montagnes qu’on apercevait au loin, sous la lune argentée, et les senteurs agrestes que la brise du lac apportait à cette heure du crépuscule où tout est parfum et poésie.

Puis, la répétition finie, après que les vendangeurs et les vendangeuses se furent bien escrimés, sur la « Coquille », vieille danse du dix-huitième siècle, ils réclamèrent, en guise de récompense, une valse. L’accompagnatrice attaqua, sur un piano que la fraîcheur du soir enrhumait visiblement, le Beau Danube Bleu, et les sympathies se rejoignirent : le promis s’en fut quérir sa promise, et les auteurs, les conseillers et autres gros bonnets de la ville, allèrent, sans façon, inviter chacun une petite paysanne, toute confuse d’un pareil honneur.

Et, tandis que dix heures sonnaient au beffroi de la petite ville de Vevey, vendangeurs et vendangeuses s’en retournèrent paisiblement dans leurs montagnes.

— Comme tout cela fleure bon l’honnêteté, fis-je remarquer à un des auteurs.

— On chante beaucoup dans notre pays, répondit-il. C’est peut-être là tout le secret de notre vertu.

Je vous le livre, cousine. Il est si joli !