Page:Sarcey - La route du bonheur, 1909.djvu/354

Cette page a été validée par deux contributeurs.
338
l’enfant.

joie autour de moi, et sans rire moi-même chaque fois que « j’y ai envie », je n’aurais plus de goût à l’existence et ne saurais plus la faire aimer. La gaieté jeune, rayonnante, un peu exubérante même, me paraît, de tous les biens, le plus précieux, et j’imagine que la nature indulgente nous l’a donné justement pour servir de balancier à nos ennuis et maintenir nos âmes en santé et en équilibre.

N’avez-vous pas souvenir de quelques-unes de ces heureuses journées qu’on marque d’un caillou blanc, et dont, longtemps, on garde le parfum ?… Ce jour-là, on fut gai follement, et sans grandes raisons… Mais le soleil brillait ; près de soi, l’on tenait ses amis préférés : le cœur était en confiance, la conscience légère, et des bouffées de jeunesse s’échappaient, en rires perlés, de toutes les bouches. Le moindre incident semblait le plus comique du monde et causait une hilarité qui épanouissait les visages et, dissipait la bile. Ce n’était point que chacun se montrât particulièrement spirituel ni fin ; mais une joie communicative était répandue dans l’air et tous y participaient, à la façon des enfants qui se grisent du bruit de leurs paroles et de leurs voix. Parfois, le fou rire gagnait deux ou trois personnes, et cela suffisait pour que les autres suivissent de con-