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l’enfant.

cher laissent deviner l’antique, le cher village que nous venons voir.

— Est-ce que tu crois qu’Elle a passé par ici ? demande, presque à chaque pas, le petit garçon qui serre sa main dans la mienne.

Lui aussi, il sent confusément, sans pouvoir le traduire mieux que par cette naïve interrogation, la raison de notre pèlerinage. Il sait que, maintes fois, nous avons admiré ensemble des châteaux, des églises et des points de vue, mais seulement pour leur beauté réputée magnifique, — tandis qu’aujourd’hui la vision d’une sublime enfant, évoquée par le village qui la vit naître, suffit à embellir les chemins que nous traversons.

Sa frêle pensée peuple aisément d’images ces solitudes grandes de cinq cents ans et toutes fraîches à son cœur.

Il voit Jehanne, la pastoure, menant paître ses brebis, et chantant avec son amie Hauviette des cantiques pieux ; il regarde avec terreur cette grand route par laquelle les méchants détrousseurs du sire de Commercy arrivaient au grand galop de leurs chevaux, pillant les villages, volant les bestiaux, brûlant les maisons, et bataillant dans un grand bruit de ferraille et de tocsins, tandis que Jehanne, en grande hâte, rentrait ses bêtes.