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l’enfant.

Elle expliqua abondamment les méfaits de Solange, qui volait jôer avec les enfants qu’elle ne connaissait pas et faire des pâtés avec ses gants, et qui remplissait de taches son manteau si joli.

La maman fronça le sourcil ; ces confidences l’affligeaient ; elle ne le cacha pas à Mlle Solange.

— Tu me fais beaucoup de peine, Solange. Miss a parfaitement raison de te gronder, et je la prie de te priver encore, ce soir, de dessert.

Puis, elle partit légère, remontant en voiture, sans un regard pour l’infortunée Solange, effondrée sous le remords, et pleurant, cette fois, de vraies larmes.

Ah ! la pauvre chérie, comme j’aurais voulu pouvoir la consoler. Je pensais, tout bas :

— Mais non, mon trésor, tu n’es pas une enfant mal élevée, tu es un petit être bien vivant, en chair et en os, qui a besoin de s’épanouir dans le jeu, dans le rire, dans la confiance et la tendresse ; tes falbalas ne sont pas de ton âge, — ni d’aucun âge, d’ailleurs, — et tes gants sont le symbole de la prison dans laquelle on cadenasse ta petite âme fraîche, qui va s’étioler, se racornir et mourir, faute d’air, d’espace, de liberté, de soleil. On ne t’élève pas,