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l’éducation des enfants.

cela pas mal d’années, et qui contribua à me faire réfléchir sur le mot que nous essayons d’analyser.

Vous savez quelle passion j’ai toujours éprouvée pour les enfants, dont les moindres gestes m’amusent et dont les épanchements ingénus me ravissent. C’était le moment où, n’en possédant pas, je me sentais attirée par ceux que je voyais, avec l’envie folle de les prendre sur mes genoux, de savoir ce qui se passait dans leur petite tête et de sentir leurs bras potelés autour de mon cou.

Donc, un après-midi, je m’installai aux Champs-Élysées, dans le voisinage d’une jolie fillette, poupée vivante, aux yeux rêveurs, aux longues boucles blondes, avec une drôle de petite bouche, rouge comme une fraise, qui semblait faite pour le sourire.

Elle était assise, mélancolique et résignée, auprès d’une miss très maigre, l’air pointu et désobligeant, mais distingué comme il convient à une miss, lorsqu’elle promène une petite fille de bonne maison, richement habillée, ou, pour mieux dire, parée comme une châsse.

L’enfant s’ennuyait à mourir, et je commençais à la prendre en pitié, quand une fillette de même âge s’approcha très poliment pour lui offrir de « jouer ensemble ».