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l’enfant.

Peu importe, alors, la somme de qualités et de défauts dont la nature l’a doué, puisque, pour laisser un libre cours aux unes et combattre les autres, il sera pourvu d’un gouvernail précieux et sensible, qui, jamais, ne laissera flotter à la dérive ses actes et ses pensées…

J’ai nommé la conscience…

Or, dans l’esprit de certaines gens, ce mot élever ne traduit rien, ou peu de chose… Les uns laissent pousser les enfants tant bien que mal, plutôt mal que bien, à la manière d’une plante sauvage assez encombrante et dont il fait bon de se garer le plus possible ; les autres — et ce sont les plus dangereux — assujettissent l’enfant à des rites conventionnels, minutieux et raffinés, qui leur tiennent lieu, en toute occasion, de vertus, de pensées et de sentiments ; et le peu de sincérité de ces pratiques a je ne sais quoi d’offensant qui en détruit le semblant de grâce.

Dieu me garde de médire de la « civilité honnête et puérile », tant goûtée par nos grand’mères ; elle a du bon. Mais elle doit trouver sa source naturelle dans le cœur ; sans quoi, elle n’évoque qu’une idée d’indignes grimaces ; la politesse, l’amabilité, lorsqu’elles ne sont pas l’expression de sentiments spontanés, ont un ragoût de comédie particulièrement déplaisant chez l’enfant.