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les lectures « convenables ».

Il existe d’autres romans plus pudiques d’aspect, plus charmants aussi de forme et qui, cependant, sont d’une lecture autrement troublante. Je ne saurais vraiment dans quelle catégorie les classer, — tel ce Visage Émerveillé, qu’on voit entre toutes les mains et dont je ne vous conseillerai la lecture que si vous considérez les grâces du style avant d’arrêter votre pensée sur le fond de l’ouvrage.

La comtesse Mathieu de Noailles est un écrivain d’une étrange séduction, et d’une originalité qui ne la fait ressembler à aucun autre. Elle a des trouvailles d’impression qui sont, à la fois, une surprise et un enchantement. L’espace, le silence, l’ombre, l’air, palpitent au travers de son imagination ; dans ce qu’elle écrit, passent des lueurs de génie :

« Le silence est un voile fin qui se balance. Mille petites sources bondissent dans l’ombre agitée, mille vents légers soufflent, toutes les feuilles remuent. On respire bien cet air romanesque, noir et limpide. »

La comtesse Mathieu de Noailles, en effet, ne respire à son aise que « dans l’air romanesque, noir et limpide des nuits » ; elle prête son cœur de païenne, éprise de la nature, éprise de la lumière, éprise d’amour, éprise de beauté terrestre, à une religieuse douce, jolie et fantasque