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l’art de tenir un salon.

tique ; mais presque tous, si j’en crois l’opinion générale, sont affreusement ennuyeux, lorsqu’ils ne se contentent pas d’être insignifiants. Et cela, parce qu’il y manque une âme faite de bienveillance et de simplicité, l’âme d’une bonne maîtresse de maison qui crée, entre tous ses hôtes le lien invisible dont ils subissent l’attrait et donne du courage aux timides, de l’esprit aux silencieux, et un peu de son doux rayonnement à tous.

Son heureuse action, d’ailleurs, n’agit que lentement, et je considère qu’il ne faut pas moins de dix ans d’efforts pour créer un salon tel que je le conçois.

Un jour, une de mes amies, la baronne G. de V…, dont le mari occupe un poste important dans les ambassades, tomba chez moi, tandis que je la croyais occupée à ses devoirs au bord de quelque fjord.

— Ma chère, me dit-elle, j’ai des projets admirables… Je vais louer un pied-à-terre à Paris ; je prierai ma mère de m’y rejoindre, et j’aurai un salon !

— Mais tout le monde en a un ! répondis-je innocemment.

— Vous n’y êtes pas du tout, reprit-elle avec volubilité. Je veux un vrai salon, qui sera le rendez-vous des savants, des peintres, des