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la jeunesse qui s’ennuie.

venir dans mes oreilles et me sert de guide !

Si, par hasard, devant elle, on faisait cette remarque qu’un voisin de table vous avait mal diverti, sans se troubler, elle répliquait :

— Tu n’avais qu’à l’amuser.

Avait-on le malheur de constater que le salon de Mme X… était mortellement froid :

— Que ne l’as-tu réchauffé ! disait-elle avec une logique imperturbable.

Avouait-on s’être ennuyé chez quelque amie :

— N’étais-tu donc pas là ? répondait-elle malicieusement.

Partout et constamment, il fallait « payer de sa personne ». Elle exigeait que l’on jouât ou chantât tant bien que mal son « morceau » pour complaire aux vieilles dames, ou rompre la monotonie d’une soirée ; elle n’admettait point que l’on ne s’occupât pas des petits enfants, « de ces pauvres chéris qui, peut-être, ne s’amusent pas », et il fallait s’ingénier à les divertir ; elle demandait la lecture à haute voix pour les grand’mères aux yeux fatigués, et une foule de commissions utiles pour les amis. Il fallait que l’on dépensât de la bonté active pour les malheureux et qu’on donnât ses soins ou le réconfort d’une visite aux malades ou aux reclus. Elle n’était point satisfaite si on ne lui contait en détail, et de son mieux, les menus incidents