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la femme.

trônent immuablement dans leur Olympe, — ou, si vous préférez, dans les salons mondains, — sans que l’aréopage sourcille.

Mais, si elles s’avisaient de travailler, — ah ! fi ! ma chère, quelle horreur ! — elles dégringoleraient de leurs cimes, et le monde, implacable et juste, renierait ces brebis galeuses.

Cela vous étonne ? Moi, aussi, cousine, et, pourtant, je viens d’acquérir la conviction que cela est ; que cet état d’esprit existe ; qu’on le loue, le prône et le glorifie ; et que des femmes ayant un cœur placé à gauche, versent de vraies larmes, parce qu’on les surprit dans la plus noble occupation qui soit : en flagrant délit de travail.

Faire œuvre de ses dix doigts est une déchéance qui, à ce que l’on raconte dans le monde, ne se pardonne jamais, jamais, jamais.

— Mince de monde ! dirait Gavroche.

Mais, pour vous édifier complètement, écoutez plutôt ma petite aventure.

L’an dernier, je reçus une lettre qui semblait échappée de quelque roman d’Alphonse Daudet. Elle disait, dans ses lignes jolies, touchantes et profondes, les horizons bornés et mélancoliques d’une vie entière de sacrifices.

Le mari, modeste fonctionnaire de l’enregis-