Page:Sarcey - La route du bonheur, 1909.djvu/217

Cette page a été validée par deux contributeurs.
201
bonheur perdu.

à conséquence ; nous ne lui rendons pas visite ; nous recevons ses hommages et ne lui accordons notre intimité que dans la mesure qu’il nous plaît. Mais une femme ! Je ne peux pourtant pas, ajouta-t-elle avec indignation, moi baronne de K…, propriétaire de plantations importantes, m’abaisser à faire des visites aux « dames » de gérants qu’occupent mes voisins.

Ce dernier trait fut jugé spirituel et décida du sort de la fine Parisienne, qui venait, avec son époux, du bonheur plein le cœur, tâter courageusement de la vie coloniale.

On convint, d’un accord unanime, qu’elle ne serait pas de la « Société ».

Ignorant l’arrêt qui le condamnait, le jeune couple fil joyeusement les sacramentelles visites de noce. Partout, il trouva visages compassés, airs cérémonieux, politesse de glace.

Suzanne, stupéfaite, se demanda un instant quel crime elle avait commis, puis finit par comprendre qu’on ne voulait pas d’elle.

— Bah ! souffla-t-elle gentiment à son mari, avec cette philosophie charmante qui la caractérisait, nous n’avons pas besoin de tous ces gens-là pour bâtir notre nid.

Jamais l’amoureux gérant n’entendit un reproche, jamais il ne surprit un regret. Suzanne est brave, je vous l’ai dit, cousine ; mais lui est