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MŒURS FIN DE SIÈCLE


Il parlait accélérément, prononçait plusieurs mots à la fois, en les remuant dans la bouche comme on fait sauter une friture de goujons dans la poêle, et les mots sortaient au petit bonheur, l’un avant l’autre, ou simultanément, ou dans leur ordre. Une lumière jaillit dans le cerveau de Mauri, et se penchant vers sa compagne :

— Qu’est-ce que je te disais !

— Rien, répondit l’autre qui n’y était pas. Cet entre-côtes est délicieux. J’en reprends un.

— Il faut convenir tout de même que l’homme est bien bête d’inviter une femme à manger. Cela ne fait pas avancer d’un pas la question sociale. Et puis, tu m’interromps ; je ne sais plus ce que je voulais dire.

Après une minute de silence :

— As-tu de la mémoire ? Oui, cela se voit. Tâche donc de me répéter tout ce que je t’ai dit ce matin. Je n’exige pas le mot à mot, les grandes lignes de la conversation suffisent.