Page:Sansot-Orland - Jules Lemaître, 1903.djvu/35

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 29 —


Il n’est pas sérieux, disent les uns. Comment voulez-vous avoir confiance en un critique qui exprime quelque part le désir de relire sérieusement dans la deuxième moitié de su vie les livres dont il aura parlé dans la première ? — Il est paradoxal, disent les autres, et l’on ne sait jamais s’il se moque des choses ou les admire. — Tout cela importe peu : il possède les deux magiques pouvoirs qui séduisent les hommes : il plaît et il fait réfléchir.

(Âmes modernes, 1895. Perrin et C. Paris).



De M. Catulle Mendés :


… Il faut se rendre à l’évidence. M. Jules Lemaître est un penseur constatant tout de suite les deux, les trois, les quatre côtés des choses auxquelles il pense. Au besoin, — car sa subtilité est prodigieuse — il inventerait des côtés. En un mot il manque de parti pris. Ah ! que cela est estimable chez le critique, mais que cela est déplorable chez le créateur ! Le don lui fut octroyé, bienfaisant et désolant, d’être une conscience d’artiste qui a peur du ridicule. Il n’a pas l’impuissance du prodigieusement superbe, ni du prodigieusement bas, — c’est surtout en poésie que les extrêmes se touchent et se confondent, — mais il en a la sensitive inquiétude. Il ne l’ose pas ! Et s’il est fort heureux que M. Jules Lemaître, par une pusillanimité qui est louable, car elle est de la modestie, de la méfiance de soi et de la délicatesse, ne se soit pas précipité éperdument dans l’immonde, il est éternellement regrettable qu’il ne monte qu’à petits pas circonspects, étudieurs, des échelons et douleurs de l’arrivée, vers la gloire des héroïques enthousiasmes. Évidemment, même hanté des plus exécrables chimères, il n’aurait pas écrit