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profond que superficiel, car le théâtre de Jules Lemaître, quoiqu’il y paraisse ; n’est point un théâtre frivole. Sous l’auteur comique il y a le moraliste singulièrement délicat sans cesse préoccupé, sous les facettes des mots plaisants, de quelque exceptionnel problème de conscience, de quelque tare sociale, de quelque intime injustice, et c’est, après l’effet charmant mais fugitif des réparties, l’impression dominante qui reste de toute pièce de Jules Lemaître.

Amuser donc ne fut point son seul objectif en allant à la rampe, et, en y apportant encore plus que le petit frisson d’émotion il voulut aussi faire œuvre utile. Mais bientôt il lui parut que même les enseignements du théâtre étaient de portée trop infime et que son rôle d’auteur était trop effacé. Son prestige pourtant n’avait fait que grandir. Depuis 1894 il tenait, à la Revue des Deux Mondes, le feuilleton dramatique ; le 16 janvier 1896 l’Académie Française l’avait admis au fauteuil de Victor Duruy ; la rosette rouge fleurissait sa boutonnière. Futilités que tout cela : l’action sollicitait Jules Lemaître et un beau jour des tréteaux de la rampe nous le vîmes sauter sur ceux de la politique.

D’aucuns — peut-être ses plus fervents admirateurs mais en qui ne vibrent point des âmes d’apôtres — l’en ont blâmé, d’autres les plus nombreux, se contentèrent de s’étonner de voir celui qu’ils considéraient comme un