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avec Corneille quand on est si bien dehors, et c’est là, ajoutait-il, un de ces actes qui font honneur à la nature humaine. » Vis-à-vis de nos autres génies surannés il ne montre, à l’occasion, pas plus de révérence. Il leur préfère le simple talent des écrivains plus proches de lui. Dans son étude sur M. Brunetière[1] il ne craignait pas de le déclarer sans ambages : « Sincèrement, J’ai beau faire, j’ai toujours besoin d’un effort pour lire Bossuet. Il est vrai que dès que j’en ai lu quelques pages, je sens bien qu’après tout, il est, comme on dit aujourd’hui « très fort », mais il ne me fait presque pas plaisir, tandis que souvent, ouvrant au hasard un livre d’aujourd’hui ou d’hier (je ne dis pas n’importe lequel, ni le livre d’un grimaud, ni d’un sous-disciple) il m’arrive de frémir d’aise, d’être pénétré de plaisir jusqu’aux moelles, — tant j’aime cette littérature de la seconde moitié du XIXe siècle, si intelligente, si inquiète, si folle, si morose, si détraquée, si subtile, tant je l’aime jusque dans ses affectations. »

Tels écrivains pourtant n’eurent pas le don de conquérir ses faveurs, peut-être pour les uns parce qu’ils n’étaient ni assez inquiets ni assez subtils, ni assez détraqués : Georges Ohnet entre autres, dont l’exécution est restée célèbre dans les fastes de la Critique, et Joséphin Soulary, le faiseur de sonnets, et la comtesse Diane, et plusieurs encore connurent

  1. Les Contemporains, Tome I.