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caricatures, nous apparaissent à présent comme des modèles sérieux dont chaque Allemand essaye de se rapprocher le plus possible. La couleur des coiffures est tout à fait indigène, et, comme chez un peuple supérieur tout doit être supérieur, je ne suis pas surpris en constatant que les femmes, comme les hommes, exhibent gravement des parapluies et des souliers d’une taille supérieure.

Le gros feldwebel de Cobern était bien renseigné. On nous a fait descendre à Coblentz. Sur le quai, on nous range par quatre ; on nous compte une première fois, on nous compte une deuxième fois, et on nous compte une troisième fois. Le chiffre trois est sacramentel en Allemagne. Des curieux nous regardent sans insister. Au fond, malgré les sentinelles qui nous contiennent, tous ces civils n’ont pas l’air rassuré. Sait-on jamais de quoi ne sont pas capables ces hommes d’un pays où les francs-tireurs surgissent d’entre les pavés des rues pour assassiner lâchement les braves soldats boches qui, par pure précaution, sont obligés de se faire précéder de vieillards, de femmes et d’enfants ? Toujours est-il qu’on ne nous laisse pas traîner sur le quai. On nous conduit vers une voie de garage, et l’on nous fait monter dans une voiture qui, de l’extérieur, paraît être un fourgon à bagages, mais qui, à l’intérieur, a des banquettes de bois disposées dans le sens de la marche, comme un tramevet.

Et nos ordonnances ? C’est peut-être le moment de les réclamer ? Nous n’y manquons pas. L’officier à qui nous nous adressons balbutie des choses obscures et, comme justement le train qui nous a amenés siffle et part, emportant vers Darmstadt les soldats dont