Page:Sandre - Le purgatoire, 1924.djvu/232

Cette page a été validée par deux contributeurs.

à René Le Gentil


CHAPITRE XVII

la vie quotidienne
(Octobre 1916).


Même pendant les représailles, les journées de Vöhrenbach étaient longues. Le problème de chaque matin comportait des solutions restreintes et peu variées, et plus d’un prisonnier se demandait au réveil par quels chemins il arriverait à l’appel du soir. Les travaux intellectuels, qui semblent les seuls raisonnables, finissent vite par fatiguer. Il n’est pas de pire endroit qu’une prison pour se pousser dans la connaissance du Dalloz ou pour se pénétrer des secrets du moteur à explosion. Quant aux lectures simples, elles supposent une santé physique et morale qu’on n’a pas toujours. Et l’on en vient tout naturellement à bricoler. Plus d’un officier rapportera de sa captivité un violon d’Ingres.

Les Russes avaient mis à la mode l’art des tapis. Les blessés aussi, dans les hôpitaux de France, exécutaient de ces réseaux de fils de coton ou de soie. Les ventes de charité vous en ont donné le dégoût. Pour un prisonnier, la confection d’un petit tapis était son premier travail manuel. Il en achevait deux ou trois,