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offiziergefangenenlager

la côte. En passant près d’eux, comme la sentinelle lui tournait le dos :

— Courage, messieurs ! leur dit-elle en français. On ne peut pas vous parler. C’est défendu. Ils sont méchants. Ils me frapperaient, moi, une pauvre vieille !

Et elle s’éloigna dans la direction du village, laissant les deux officiers émus et déconcertés, tandis que la sentinelle revenait lourdement vers la guérite jaune et rouge.

Les Anglais prenaient un plaisir extrême à ces spectacles du dimanche. Ils étaient trois ou quatre, pas davantage, tous très jeunes et presque tous aviateurs. Ils n’avaient rien de l’attitude un peu raide qu’on prête à ceux de leur race. Ils riaient de nos plaisanteries sans retenue, et eux-mêmes ne détestaient pas d’exercer leur humour aux dépens des Boches. Ils y apportaient une ardeur juvénile qui nous réjouissait. C’étaient les meilleurs garçons du monde.

Un jour, la kommandantur avait introduit quelques vaches dans le camp, pour leur faire paître l’herbe qui devenait trop haute entre les deux rangées de fils de fer de l’enceinte. Elles fournirent à un Anglais l’occasion d’une farce. Il s’approcha des fils de fer et, apostrophant la sentinelle à qui il montrait un morceau de pain bien blanc et d’un beau poids :

— Vous n’en avez pas, hein, du pain comme celui-là ?

— Ah ! non, répondit la sentinelle, malgré le règlement, car elle espérait qu’un présent inespéré allait lui échoir. Et elle roulait des yeux cupides.

L’Anglais reprit :