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LE CHÈVREFEUILLE

J’allongeai le pas. Je perdis bientôt paroles et musique.

Mais je ne pouvais me défaire de cette inquiétude qui m’avait pris, là, devant ces chanteurs des rues, pour un visage où j’avais cru reconnaître… Reconnaître quoi ? Et qui ? Rien, personne.

J’avais beau chercher, et j’avais beau surtout me remontrer qu’il était absurde, vain, puéril et tout à fait sot, de m’obstiner à chercher quand même, je pressentais, malgré moi, que j’avais déjà vu cet homme à barbe blonde, que je le connaissais, et que j’aurais dû le reconnaître.

J’étais trahi par mémoire, et j’en éprouvais du dépit.

Évidemment, l’homme ne m’avait guère laissé le temps de le dévisager.