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DEUXIÈME PARTIE

pas prévu que ton bel espoir pourrait ne pas se réaliser du tout ? » Je te demande pardon, j’y ai songé. Et si je suis parti avec un grand espoir, je n’en suis pas moins parti avec une crainte aussi grande. C’est sous cette double influence que j’ai traîné mon sac et mon fusil sur les routes encombrées de l’été de 1914. Marches, contre-marches, combats, patrouilles, la retraite, la poursuite, l’épique pagaille de nos trois premiers mois, la faim, la soif, la fatigue, l’envie de dormir, — te rappelles-tu comme nous avions envie de dormir, de dormir n’importe où, dans un fossé boueux, sous les roues des longs convois d’artillerie aux chevaux harassés, malgré nos chefs, et malgré l’ennemi qui nous chassait ou qu’il fallait chas-