Page:Sandeau - Sacs et parchemins.djvu/248

Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Je vous vis et je vous aimai. J’avais juré aux pieds d’une mourante d’ensevelir mon cœur avec elle, de ne plus vivre que de son souvenir ; je vous vis, je devins infidèle et parjure. Ah ! de quelle épouvante ne fus-je pas saisi, en découvrant que je n’étais pas mort à tout ce qui fait vivre, que j’étais jeune encore, que je pouvais aimer, que j’aimais ! Ô douce créature, que vous m’avez coûté de remords et de larmes ! Je voulais vous fuir ; une force invincible me ramenait vers vous. Chaque soir, en vous quittant, je faisais le serment de ne plus revenir ; je revenais le lendemain, plus malheureux, plus épris que la veille. Ah ! j’ai bien souffert, ah ! j’ai bien combattu. Vous le savez, mon Dieu, vous qui lisez dans le fond des âmes ! Que de fois, en retournant le soir, par les sentiers déserts, au château de mes pères, j’ai cru voir s’agiter dans l’ombre le spectre