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perdu ton cœur. Que j’aie été ta maîtresse ou ta mère, peu importe. Que je t’aie inspiré de l’amour ou de l’amitié ; que j’aie été heureuse ou malheureuse avec toi, tout cela ne change rien à l’état de mon âme à présent. Je sais que je t’aime et c’est tout. (Ici trois lignes rayées.) Veiller sur toi, te préserver de tout mal, de toute contrariété, t’entourer de distractions et de plaisirs, voilà le besoin et le regret que je sens depuis que je t’ai perdu.

Pourquoi cette tâche si douce et que j’aurais remplie avec tant de joie, est-elle devenue peu à peu si amère et puis tout à coup impossible ? Quelle fatalité a changé en poison les remèdes que je t’offrais ? Pourquoi, moi qui aurais donné tout mon sang pour te donner une nuit de repos et de calme, suis-je devenue pour toi un tourment, un fléau, un spectre ? Quand ces affreux souvenirs m’assiègent (et à quelle heure me laissent-ils en paix !) je deviens presque folle. Je couvre mon oreiller de larmes. J’en-