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Ayant appris d’Antoine que les dames de Valvèdre ne dîneraient pas en bas, je voulus me soustraire au déplaisir d’un nouveau tête-à-tête avec Moserwald en me faisant servir mystérieusement dans un coin du petit jardin de mon hôte, quand celui-ci m’annonça que je serais seul dans sa grande salle basse avec Obernay, l’israélite ayant dit qu’il souperait peut-être dans la soirée.

— Et que fait-il ? où est-il maintenant ? demandai-je.

— Il est chez madame de Valvèdre, répondit Antoine, dont la figure prit une expression d’étonnement comique à l’aspect de ma stupeur.

— Ah ça ! m’écriai-je, il la connaît donc ?

— Je n’en sais rien, monsieur ; comment voulez-vous que je sache ?…

— C’est juste, cela vous est fort égal, et, quant à moi… Mais vous le connaissez, vous, ce M. Moserwald ?

— Non, monsieur ; je l’ai vu avant-hier pour la première fois.

— Il vous avait dit en partant qu’il reviendrait bientôt ?

— Non, monsieur, il ne m’avait rien dit du tout.

Je ne sais quelle sourde colère s’était emparée de moi en apprenant que ce juif avait eu l’audace ou l’habileté, à peine débarqué, de pénétrer auprès d’Alida, qu’il prétendait ne pas connaître. Obernay s’attarda beaucoup, il faisait nuit quand il rentra ; je l’avais attendu pour dîner, et sans mérite aucun, je