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Enfin je m’arrêtai à un parti moins dramatique qui fut de jouer du hautbois. J’en jouais très-bien, au dire de mon père, qui était bon musicien, et que ne contredisaient pas trop, sous ce rapport, les artistes qui fréquentaient notre maison belge. Ma porte était assez éloignée de celle de madame de Valvèdre pour que ma musique ne troublât pas trop son sommeil, si elle dormait, et, si, elle ne dormait pas, ce qui était plus que probable d’après les fréquentes entrées de sa suivante, elle s’informerait peut-être de l’agréable virtuose : mais quel fut mon dépit lorsqu’au beau milieu de ma plus belle mélodie le valet de chambre, ayant frappé discrètement à ma porte, me tint d’un air aussi embarrassé que respectueux le discours suivant :

— Je demande bien des pardons à monsieur ; mais, si monsieur ne tient pas absolument à faire ses études dans une auberge, il y a madame qui est très-souffrante, et qui demande en grâce à monsieur…

Je lui fis signe que c’était assez d’éloquence, et je remis avec humeur mon instrument dans son étui. Elle voulait donc absolument dormir ! Mon dépit devint une sorte de rage, et je fis des vœux pour qu’elle eût de mauvais rêves ; mais un quart d’heure ne se passa pas sans que je visse reparaître le domestique. Madame de Valvèdre me remerciait beaucoup, et, ne pouvant dormir malgré mon silence, elle m’autorisait à reprendre mes études musicales ; en même temps, elle me faisait demander si je n’avais pas un livre