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de la lui remettre. Aussitôt que cet excellent Moserwald avait connu ma situation, il avait jeté au feu ma demande d’argent à Obernay, il avait pris la poste, il accourait ; argent, aide, affection, il m’apportait tout ce qui pouvait sauver Alida ou prolonger sa vie.

Je ne voulus pas qu’il la vît sans que j’eusse pris le temps de la prévenir d’une rencontre amenée, à mon dire, par le hasard. On craint toujours d’éclairer les malades sur l’inquiétude dont ils sont l’objet. Je craignais aussi que le féroce préjugé d’Alida contre les juifs ne lui fît accueillir froidement cet ami si sûr et si dévoué.

Elle sourit de son sourire étrange, et ne fut pas dupe du motif qui amenait Moserwald à Palerme ; mais elle le reçut avec grâce, et je vis bientôt que la distraction de voir un nouveau visage et le plaisir d’entendre parler de sa famille lui faisaient quelque bien. Quand je pus être seul avec Nephtali, je lui demandai son impression sur l’état où il la trouvait.

— Elle est perdue ! me répondit-il ; ne vous faites pas d’illusion. Il ne s’agit plus que d’adoucir sa fin.

Je me jetai dans ses bras et je pleurai amèrement : il y avait si longtemps que je me contenais !

— Écoutez, reprit-il quand il eut essuyé ses propres larmes, il faut, je pense, avant tout, qu’elle ne voie pas son mari.

— Son mari ? où donc est-il ?

— À Naples, il la cherche. Quelqu’un qui vous a aperçus quittant Alger lui a dit que sa femme semblait