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nous nous l’étions promis…, et moi, pleurant Valvèdre quand même, lui, regrettant Adélaïde malgré tout, nous allons nous donner le baiser d’adieu suprême… Tiens, cela vaut mieux que l’avenir qui nous attendait certainement, et je suis contente de mourir…

En parlant ainsi, elle fondait en larmes. Bianca pleurait aussi, sans rien trouver pour la consoler, et moi, j’étais paralysé par l’épouvante et la douleur. Quoi ! c’était là le dernier mot de cette passion funeste ! Alida mourait en pleurant son mari, et en disant : « L’autre ne m’aime pas ! » Certes, en voulant l’amour d’une femme dont l’époux était sans reproche, j’avais cédé à une mauvaise et coupable tentation, mais comme j’étais puni !

Je fis un suprême effort, le plus méritoire de ma vie peut-être : je m’approchai de son lit, et, sans me plaindre de rien pour mon compte, je réussis à la calmer.

— Tout ce que tu viens de rêver, lui dis-je, c’est l’effet de la fièvre, et tu ne le penses pas. D’ailleurs, tu le penserais, que je n’y voudrais pas croire. Ne te contrains donc plus devant moi, dis tout ce que tu voudras, c’est la maladie qui parle. Je sais qu’à d’autres heures tu verras autrement mon cœur et le tien. Que tu croies en Dieu, que tu rendes justice à Valvèdre, que tu te reproches de n’avoir pas compris un mari qui n’avait que des vertus et qui savait peut-être aimer mieux que tout le monde, c’est bien, j’y con-