amie ? À quoi donc pense-t-elle du matin au soir ? Peut-être qu’elle ne pense pas.
— Tu te trompes. Comme elle a beaucoup d’esprit, elle pense au contraire beaucoup, et peut-être même qu’elle pense trop.
— Trop penser ! Papa me dit toujours : « Pense, pense donc, tête folle ! pense à ce que tu fais ! »
— Le père a raison. Il faut penser toujours à ce qu’on fait et jamais à ce qu’on ne doit pas faire.
— À quoi donc pense Alida ? Voyons, le devines-tu ?
— Oui, et je vais te le dire.
Adélaïde baissait instinctivement la voix ; je collai mon oreille contre la fente du mur, sans me rappeler le moins du monde que je m’étais promis de ne jamais espionner.
— Elle pense à toutes choses, disait Adélaïde : elle est comme toi et moi, et peut-être beaucoup plus intelligente que nous deux ; mais elle pense sans ordre et sans direction. Tu peux comprendre cela, toi qui me racontes souvent tes songes de la nuit. Eh bien, quand tu rêves, penses-tu ?
— Oui, puisque je vois un tas de personnes et de choses, des oiseaux, des fleurs…
— Mais dépend-il de toi de voir ou de ne pas voir ces fantômes-là ?
— Non, puisque je dors !
— Tu n’as donc pas de volonté, et, par conséquent, pas de raison et pas de suite d’idées quand tu rêves.