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elle autre chose que le désir de contrarier. Elle remplissait un devoir qui lui pesait. Elle le remplissait en dépit de tous et d’elle-même. Son regard lucide, qui surprenait les rougeurs d’impatience d’Alida et qui pénétrait mon affreux malaise, semblait nous dire à l’un et à l’autre : « Croyez-vous que cela m’amuse ? »

Au bout d’une heure de conversation très-pénible dont mademoiselle Juste et moi fîmes tous les frais, car Alida était trop irritée pour avoir la force de le dissimuler, j’appris enfin par hasard que M. de Valvèdre, au lieu d’accompagner ses sœurs et ses enfants jusqu’à Genève le 8 juillet, les avait confiés à Obernay pour s’arrêter autour du Simplon. Je me hâtai d’aller au-devant de la découverte qui me menaçait, en disant que, là précisément, j’avais rencontré M. de Valvèdre et avais fait connaissance avec lui sans savoir son nom.

— C’est singulier, observa mademoiselle Juste ; M. Obernay ne croyait pas que vous fussiez de ce côté-là.

Je répondis avec aplomb qu’en voulant gagner la vallée du Rhône par le mont Cervin, j’avais fait fausse route, et que j’avais profité de ma bévue pour voir le Simplon, mais que, craignant les plaisanteries d’Obernay sur mon étourderie à me conduire en dépit de ses instructions, je ne m’en étais pas vanté dans ma lettre.

— Puisque vous étiez si près de Valvèdre, dit Alida avec la même tranquillité, vous eussiez dû venir me voir.