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qu’elle me présentât en particulier à sa fille aînée.

— Oui, oui, répondit-elle avec un affectueux enjouement, vous allez vous faire de grandes révérences, c’est l’usage ; mais souvenez-vous un peu d’avoir été compagnons d’enfance pendant un an, à Paris. M. Valigny était alors un garçon plein de douceur et d’obligeance pour toi, ma fille, et tu en abusais sans scrupule. À présent que tu n’es que trop raisonnable, remercie-le du passé et parle-lui de ta marraine, qui a continué d’être si bonne pour toi.

Adélaïde était fort intimidée ; mais j’étais si bien en garde contre le danger de l’effaroucher, qu’elle se rassura avec un tact merveilleux. En un instant, je la vis transformée. Cette rêveuse et fière beauté s’anima d’un splendide sourire, et elle me tendit la main avec une sorte de gaucherie charmante qui ajoutait à sa grâce naturelle. Je ne fus pas ému en touchant cette main pure, et, comme si elle l’eût senti, elle sourit davantage et m’apparut plus belle encore.

C’était un type très-différent de celui d’Obernay et de Rosa, qui ressemblaient à leur mère. Adélaïde en tenait aussi par la blancheur et l’éclat ; mais elle avait l’œil noir et pensif, le front vaste, la taille dégagée et les extrémités fines de son père, qui avait été un des plus beaux hommes du pays ; madame Obernay restait gracieuse et fraîche sous ses cheveux grisonnants, et, comme Paule de Valvèdre, sans être jolie, était extrêmement agréable : on disait dans la ville que, lorsque les Obernay et les Valvèdre étaient réunis, on