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— N’es-tu pas guérie ? n’es-tu pas heureuse et libre, Valentine ? À quoi peut te servir désormais la pauvre Louise ?

— Ma sœur, ô ma sœur ! dit Valentine en l’enlaçant de ses bras ; vous ne me quitterez point ! Vous ne savez pas mes chagrins et les périls qui m’entourent. Si vous me quittez, je suis perdue.

Louise garda un triste silence ; elle se sentait une mortelle répugnance à écouter les aveux de Valentine, et pourtant elle n’osait les repousser. Valentine, le front couvert de honte, ne pouvait se résoudre à parler. Le silence froid et cruel de sa sœur la glaçait de crainte. Enfin, elle vainquit sa propre résistance, et lui dit d’une voix émue :

— Eh bien, Louise, ne voudras-tu pas rester auprès de moi, si je te dis que sans toi je suis perdue ?

Ce mot, deux fois répété, offrit à Louise un sens qui l’irrita malgré elle.

— Perdue ! reprit-elle avec amertume, vous êtes perdue, Valentine ?

— Oh ! ma sœur ! dit Valentine blessée de l’empressement avec lequel Louise accueillait cette idée, Dieu m’a protégée jusqu’ici ; il m’est témoin que je ne me suis livrée volontairement à aucun sentiment, à aucune démarche contraire à mes devoirs.

Ce noble orgueil d’elle-même, auquel Valentine avait encore droit, acheva d’aigrir celle qui se livrait trop aveuglément peut-être à sa passion. Toujours facile à blesser, parce que sa vie passée était souillée d’une tache ineffaçable, elle éprouva comme un sentiment de haine pour la supériorité de Valentine. Un instant, l’amitié, la compassion, la générosité, tous les nobles sentiments s’éteignirent dans son cœur ; elle ne trouva pas de meilleure vengeance à exercer que d’humilier Valentine.

— Mais de quoi donc est-il question ? lui dit-elle avec dureté. Quels dangers courez-vous ? Je ne comprends pas de quoi vous me parlez.

Il y avait dans sa voix une sécheresse qui fit