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dence en quittant son couvent à la veille d’en sortir de plein droit, et laisse-moi te dire que tu as fait, toi, en l’y encourageant, une étourderie dont je ne t’aurais jamais crue capable.

— Non, mon oncle, j’ai été abusée par les apparences. Marie m’écrivait : « Je suis majeure, mais on ne se dispose pas à me rendre ma liberté. Je n’ai pas d’autre parti à prendre que de fuir ; toi seule au monde peux me donner asile. Le veux-tu ? » Je ne pouvais pas refuser. C’est en arrivant ici qu’elle m’a appris qu’il s’en fallait de quelques semaines qu’elle eût atteint sa majorité. Je connaissais bien Marie, je savais qu’elle avait un an de moins que moi, mais je ne savais pas son jour de naissance. Quand je l’ai su, j’ai compris qu’elle devait rester bien cachée, et j’ai pris toutes les précautions possibles. J’y avais réussi jusqu’à présent. Marie ne sort pas de l’enclos, et mes métayers sont des gens sûrs et dévoués qui ne connaissent pas son nom, qui n’ont pas vu sa figure, et qui, sans être dans la confidence, sont assez méfiants pour ne pas répondre aux questions qu’on pourrait leur faire.

— Eh bien ! ma chère fille, redouble de précautions, car, à l’heure qu’il est, mademoiselle Marie est encore sous la dépendance de sa tutrice, et celle-ci pourrait la faire amener chez elle ou reconduire au couvent… entre deux gendarmes, comme on dit !