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te faire plaisir. Comme te voilà pressée aujourd’hui de me voir courir auprès de cette comtesse ! Hier tu me blâmais d’accepter si vite sa clientèle !

— Je ne l’avais pas vue. Je ne pensais plus que c’était du si grand monde. Allons, voilà ta cravate blanche et ton habit noir.

— Ma foi non ! nous sommes à la campagne, je ne me mettrai pas en tenue à neuf heures du matin.

— Si fait, si fait, s’écria ma femme en me mettant malgré moi la cravate de cérémonie, je veux que tu aies l’air de ce que tu es !

Pour couper court, je dus céder et je passai dans mon cabinet, où m’attendait madame de Nives.

Je ne l’avais jamais vue que de loin, aux lumières, et ne m’attendais pas à la trouver si belle et si jeune encore. C’était une femme d’environ quarante ans, grande, blonde et mince. Ses manières étaient excellentes ; sauf le roman de sa vie, que je savais grosso modo, l’opinion ne lui reprochait rien.

— Je viens, monsieur, me dit-elle, vous demander conseil dans une affaire très-délicate, et vous me permettrez de vous raconter mon histoire, dont vous ne savez probablement pas tous les détails. Si j’abuse de vos moments…

— Mon temps vous appartient, — répondis-je,