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Nous souhaitions te marier pour te garder au pays. Marianne avait vingt ans. Elle n’était pas orpheline, indépendante et riche comme elle l’est à présent. Ce mariage était encore possible.

— Et à présent il ne l’est plus, répondit vivement Pierre ému. Je suis plus âgé et plus pauvre que je ne l’étais ; je ne lui conviendrais pas. Je t’en prie, ma bonne mère, ne m’expose jamais à l’humiliation d’être refusé par cette personne réfléchie et dédaigneuse ; ne lui parle jamais de moi ! J’espère que tu ne lui en as jamais parlé ?

— Si fait, quelquefois.

— Et elle a répondu ?…

— Rien ! Marianne ne répond jamais quand sa réponse peut l’engager.

— C’est vrai, j’ai remarqué cela. Elle est d’une prudence… qui a pour moi quelque chose d’horrible ! Une femme du monde, lancée, coquette, décevante,… cela se conçoit, elle veut des adorateurs ; mais une fille de campagne qui ne veut pas qu’un mari calcule et se tient bien autrement, c’est un bloc de glace qui ne fond sous aucun soleil.

— Tais-toi, la voilà qui arrive, dit madame André, qui avait fort bien remarqué le dépit douloureux de son fils. N’ayons pas l’air de la blâmer.