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mais je n’en sus rien, et elle ne m’avoua son dépit qu’après le mariage.

— Cette personne-là, c’était moi, reprit ma femme, et j’avoue que l’on m’eût coupée par morceaux plutôt que de me faire avouer que j’étais jalouse.

— Pourquoi ça, dis-le ?

— Parce que… parce que la jalousie est une chose qui nous porte à douter de l’homme que nous aimons. Si nous étions sûres qu’il nous trompe, nous serions guéries de l’aimer ; mais nous ne sommes pas sûres, nous craignons de l’offenser et de nous abaisser devant lui par l’aveu de notre méfiance.

— C’est fort bien expliqué, ma femme ! et alors… on souffre d’autant plus qu’on le cache ?

— On souffre beaucoup, et il faut un grand courage ! Tu crois donc que Miette a ce courage-là ?

— Et cette souffrance ! d’autant plus que sa fierté a été blessée par quelqu’un.

— Par qui ?

— Je me le demande !

— C’est peut-être par moi ?

— C’est impossible !

— Eh bien ! c’est la vérité. Je l’ai brusquée, cette enfant, parce qu’elle semblait croire qu’Henri resterait à Paris. J’avoue que je le craignais aussi, et que j’en avais de l’humeur.