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digne de pardon. Miette a souffert par ma faute, je le sais. Elle a vu son frère malheureux à cause de moi ; elle a cru pendant un jour ou deux que j’étais épris de l’héritière et que je me prêtais à la compromettre pour évincer Jacques. Sans toi, cher père, sans les rudes explications d’aujourd’hui, elle le croirait peut-être encore. Sais-tu qu’un moment tu m’as effrayé ? mais quand tu m’as mis dans la nécessité de dire à mademoiselle de Nives devant tous ce que je devais penser, ce que j’avais réellement pensé de sa légèreté, j’ai compris que tu me rendais un grand service, et je me suis trouvé tout d’un coup maître et content de moi-même. Si l’étrangeté de Marie m’a surpris un instant, nul que moi ne doit jamais le savoir, et, si elle-même a conçu quelque doute à cet égard, je suis heureux que tu m’aies donné le moyen de la dissuader. Elle se doit à Jacques, oui, certes, et à personne autre. Au milieu de ses petitesses d’enfant, elle est grande. Jacques a le gros bon sens qui lui manque, et, comme il l’adore, il le lui communiquera sans qu’il le sache lui-même, et sans qu’elle sente l’enseignement. Il dira toujours comme elle, mais il fera en sorte qu’elle pense à son tour comme lui.

— Bien raisonné, mon fils, et à présent que Dieu nous aide ! Dans ces dénoûments que les circonstances pressantes nous forcent parfois à im-