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trouverai, dans je ne sais quelle poivrière, un petit nid où j’irai lire ou rêver de temps en temps.

— Si c’est là toute ton ambition, j’approuve, lui répondis-je, et je te donne le joujou. Tu y laisseras revenir le gibier que le vieux baron fusillait sans relâche, n’ayant, je crois, rien autre à mettre au garde-manger, et l’an prochain nous y tuerons ensemble quelques lièvres. Sur ce, allons dîner, après quoi nous parlerons d’affaires plus sérieuses.

J’avais effectivement des projets sérieux pour mon fils, et nous n’en parlions pas pour la première fois. Je souhaitais le marier avec sa cousine Émilie Ormonde, que l’on appelait Miliette et encore mieux Miette, par abréviation.

Ma défunte sœur avait épousé un riche paysan des environs, fermier de terres considérables, qui avait laissé au moins cent mille écus au soleil à chacun de ses enfants. Miette et Jacques Ormonde. Ces deux orphelins étaient majeurs tous deux. Jacques avait trente ans, Émilie en avait vingt-deux.

Quand j’eus rafraîchi la mémoire d’Henri relativement à ce projet, dont il ne paraissait point trop pressé d’être entretenu, je l’examinai d’autant plus attentivement que j’avais brusqué l’attaque pour surprendre sa première impression. Elle fut plus triste que gaie, et il tourna les yeux vers sa mère comme pour chercher dans