Page:Sand - Theatre de Nohant.djvu/69

Cette page a été validée par deux contributeurs.

le berceau de jasmin jaune, et au loin, bien loin, l’horizon bleu de la mer, l’ancienne maîtresse fantasque et farouche devenue l’amie des souvenirs de vieillesse !

ANDRÉ, rêvant.

Et, dans la salle à manger, des images en couleur qui vous font voir au naturel…

LE DRAC.

Les naufrages dont on est sorti, les désastres qu’on ne craint plus.

ANDRÉ.

Ah ! oui, oui !… riche !

LE DRAC.

Eh bien, tu peux l’être. Bernard t’a confié un trésor, nul ne le sait !… Bernard est parti furieux, la tête perdue… Quand il reviendra, tu peux lui dire : « Quel argent m’as-tu confié ? où sont les témoins ? où est la preuve ? »

ANDRÉ, se secouant et se levant.

Non ! oh ! non, par exemple ! Pouah ! v’là un vilain rêve ! C’est pas joli, tout ça. Est-ce que je dormais ? (Voyant le Drac.) Ah ! t’es encore là, faignant ?

LE DRAC.

Vous rêviez tout haut, patron ; vous disiez…

ANDRÉ.

Ce qu’on dit en dormant, c’est rien, c’est des bêtises, ça compte pas !… Allons, es-tu prêt ? J’vas t’aider à descendre tout ça. (Il se charge d’engins de pêche.)

LE DRAC, à part.

Ah ! toujours échouer quand je parle à leur âme ! Je ne peux rien que par le mensonge ! (Haut.) Dites donc patron, pourquoi que vous le regrettez tant que ça, ce méchant Bernard ?

ANDRÉ.

Il n’est pas méchant.

LE DRAC.

Ah ! par exemple, si ! Voyez donc ce qu’il a écrit là, sur le mur, en partant ?