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ERGASTE.

Je le crois ! aussi ne veux-je point te faire de mal. Tiens, connais-tu cela ? (Il lui montre une pièce de monnaie.)

PIERROT.

Je n’y connais pas grand’chose, monsieur ; je ne sais point calculer l’argent.

ERGASTE.

C’est une pièce blanche, pas moins ?

PIERROT.

Oh ! pas bien blanche ! mais je vous dis que je n’y entends rien.

ERGASTE.

Tu ne gagnes donc point ta vie à garder les oies ?

PIERROT.

Si fait, je gagne mon pain ; on me donne les sabots pardessus le marché.

ERGASTE.

Eh bien, veux-tu gagner cette pièce d’argent ?

PIERROT.

Nenni, monsieur, si c’est à faire quelque chose de mal.

ERGASTE.

Fi ! qu’il est méfiant ! Il s’agit de nous aider, mes camarades et moi, à déjeuner sous cet ombrage. Tiens ! les vois-tu qui viennent par ici ?

PIERROT.

Oh ! le beau monde ! le joli monde ! tous messieurs ou madames en braves habits de ville ! on n’en voit point souvent par ici, du monde comme ça !

ERGASTE.

En as-tu peur ?

PIERROT.

Oui, bien un peu ; car, s’ils me réclament à déjeuner, moi je n’ai rien à leur donner d’abord !

ERGASTE.

Nous portons tout ce qu’il nous faut dans notre chariot,