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MAX.

Tu veux savoir ce que j’ai contre toi ?

PÉRÉGRINUS.

Oui, j’aime mieux savoir.

MAX.

Eh bien, sais-tu ce que c’est qu’un arbre de Noël ?

PÉRÉGRINUS, surpris et embarrassé.

Un… arbre de Noël ?

MAX.

Oui, un jouet d’enfant, avec des bougies allumées, avec des rubans, des fruits, des bonbons, des pantins pendus aux branches ? Un bon Allemand comme toi sait de reste que c’est la surprise obligée, la veille de Noël, pour tous les marmots au-dessous de sept ans ?

PÉRÉGRINUS.

Je sais ça : après ?

MAX.

Eh bien, que penses-tu d’un marmot de trente ans qui, chaque année, se donne, à lui tout seul, en grand secret, le divertissement de se surprendre ainsi lui-même ? Moi, je pense que c’est un malheureux qui tombe en enfance, un homme qui devient idiot ou fou, et cet homme-là, c’est toi !

PÉRÉGRINUS, troublé, se levant.

Max qui t’a dit cela ?

MAX.

Le valet que tu as chassé hier. Il est venu tantôt me révéler ta manie, et il a bien fait, car je suis accouru, comme tu vois.

PÉRÉGRINUS.

Si tu écoutes les propos d’un valet ivrogne…

MAX.

Oh ! n’essaye pas de me tromper ! J’ai vu arriver ici certaine corbeille que tu réclamais tout à l’heure, et je t’averti ; que tu ne la reverras pas, car j’en ai fait bonne et prompte justice : j’ai tout jeté au feu et dans la rue !