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COQUERET.

Ça ne fait rien, ça sera dit, et, si tu veux dire comme moi…

LOUISE.

En voilà assez. Je t’ai dit que ça ne se pouvait pas, que je ne me voulais point marier de si tôt, et qu’il n’y fallait point du tout penser. Ne me parle donc plus de ça, je te le défends ! (Coqueret, qui a mis la veste et les pantoufles sur une chaise, s’assied dessus avec désespoir et se met à pleurer, la tête dans ses mains. Louise le regarde un instant, se détourne et se cache pour pleurer aussi. Louise essuie ses yeux.) Monsieur sonne ; allons ! va !

COQUERET.

Non, je ne veux plus servir, je me veux faire mourir !

LOUISE.

Allons ! es-tu fou ? Veux-tu faire attendre monsieur ?

COQUERET.

Il y a dix ans que je l’attends tous les jours, il peut bien m’attendre une fois !

LOUISE.

Tu veux me faire de la peine ?

COQUERET.

Je peux bien t’en faire, je ne t’en ferai jamais autant comme tu m’en fais !

LOUISE, sévère.

Alors, tu n’as plus d’amitié pour moi ? c’est fini ?

COQUERET.

Pourquoi est-ce que j’aurais de l’amitié pour quelqu’un qui me déteste ?

LOUISE.

Tu ne dis pas ce que tu penses. Nous avons été élevés ensemble, et tu sais que je t’aime beaucoup ; mais je ne peux pas t’épouser. Ça ne dépend pas de ma volonté… Allons ! …

COQUERET.

Tu mens ! tu n’as plus ni mère, ni parents, ni rien ! tu ne dépends que de la volonté de monsieur, qui fait tout ce que tu souhaites, et si… (On sonne encore.)