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cun veut toucher et caresser Plutus, les pauvres se réjouissent, les riches tremblent de perdre ses faveurs. Écoutez, voici les cris et les acclamations de triomphe, et, comme nous, manquons de musiciens et de joueurs de flûte, vous allez entendre un vieillard que personne, ne connait, une espèce de rapsode qui passait et qui s’est joint à nous, lequel célèbre en très-joli langage les louanges de Plutus et la joie des assistants.

MYRTO.

C’est donc comme sur le théâtre d’Athènes, où la mode est venue de ne plus faire chanter le chœur, mais de taire parler un acteur qui se mêle à la pièce ?

CARION.

Absolument. Écoutez, écoutez ! Le voilà ! les voilà tous ! Évaï ! Évaï ! (On crie derrière le théâtre : « Évaï ! Évaï ! » )


Scène II

CARION, MYRTO, CHRÉMYLE, PLUTUS, porté par les Paysans sur un brancard de feuillage. Amis et Voisins de Chrémyle avec leurs femmes et leurs enfans. MERCURE, déguisé en rapsode, avec une lyre, une barbe et un vieux sagum. — BACTIS entre d’un autre côté et se tient à l’écart.
MERCURE.

Honneur au plus beau des immortels ! honneur à Plutus, le plus chéri des dieux ! Nous brûlions de te posséder dans nos campagnes, nous étions desséchés de soupirer après toi. Délions les bœufs, et que le soc de la charrue se couvre de rouille ! Ta présence va nous dispenser des soucis et de la fatigue ! Tout va germer et mûrir sans que nous en prenions aucun soin. Nos raisins de Lemnos vont écraser sous leur poids les supports et les treilles ; nos jeunes plants d’oliviers vont se couvrir, avant la saison, de fruits abondants et sains ! Ô mes amis, ne songeons plus qu’à couper du lierre pour couronner nos coupes ! Nous allons, mollement couchés